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Colos annulées : l'Etat adepte de la dernière minute

Dix jours avant leur début, les colos d'hiver ont été annulées.

Dix jours avant leur début, les colos d'hiver ont été annulées.

L'Etat a enfin officialisé une décision largement pressentie : la suspension des colos aux vacances de février. Pourquoi si tardivement ?


Publié le 31/01/2021
Actualisé le 04/06/2021
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Plus personne n'y croyait. L'espoir que les colonies de vacances de février puissent se tenir s'est amenuisé au fur et à mesure que la situation sanitaire du pays s'est dégradée. L'apparition du variant britannique fin décembre puis l'augmentation de la prise en charge hospitalière début janvier ont douché les espoirs des plus optimistes. Pourtant, l'Etat n'a confirmé l'annulation des colos d'hiver que mardi dernier, soit dix jours avant le début des vacances de février.

Oui, la gestion d'une pandémie n'est pas chose facile. Oui, les controverses scientifiques n'aident pas à prendre des décisions rapides. Mais dans le cas présent, ce sont les organisateurs de séjours eux-mêmes qui ont inlassablement appelé le ministère à clarifier la situation. "Puisque nous courons à l'interdiction, autant l'annoncer tout de suite", disait en substance le secteur depuis plusieurs semaines.

Cette décision est logique et s'inscrit dans une stratégie de maîtrise de l'épidémie que personne n'ira contester. Le brassage, c'est l'atout de la colo. Ça en devient son pire ennemi par temps de Covid. Toutefois, l'annonce tardive de l'interdiction des séjours hivernaux révèle trois éléments sur la conception que l'Etat se fait des colonies de vacances.

Sans compassion pour les anims

La suspension des colos a été annoncée dans un e-mail de la Direction de la Jeunesse, de l'Education populaire et de la Vie Associative (DJPEVA). "Au regard de l’évolution des conditions sanitaires, [...] il n’est donc pas envisagé de rouvrir ces accueils pour les vacances d’hiver", écrit la DJPEVA. S'ils ont le mérite de la clarté, les mots sont froids et techniques. Il n'y a pas eu de prise de parole ministérielle pour relayer le message avec des termes qui auraient pu manifester un peu plus de compassion, à l'égard des équipes pédagogiques qui pensaient travailler cet hiver et à l'égard des organisateurs de colos à la santé déjà fragilisée, quand ils sont encore en vie, par la saison précédente.

Ce faisant, l'Etat ne perçoit pas que l'engagement des anims ne se limite pas à une relation contractuelle. L'annulation des colos hivernales prive de boulot des jeunes qui paient le prix fort dans cette crise. Mais elle les prive surtout d'une activité qui a du sens. Cela dépasse le simple contrat de travail. Nos équipes se réunissaient déjà depuis des semaines pour préparer leur séjour et faire de la colo un lieu d'émancipation, malgré toutes les contraintes sanitaires. Avoir un mot pour reconnaître leur engagement et leur investissement n'aurait rien changé à leur situation financière, mais cela aurait permis à l'Etat de manifester son soutien à l'égard des anims. Depuis le début de la crise, leur rôle et leur disponibilité sont cruciales pour apaiser les effets néfastes qui touchent les enfants. Reste aux organisateurs, seuls, à trouver comment valoriser le travail déjà engagé.

Bricoler dans l'urgence

En fait, les colos d'hiver ne sont pas totalement interdites. Depuis l'intervention en décembre d'Adrien Taquet, secrétaire d'État en charge de l'Enfance et des Familles, les enfants en situation de placement par l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE) peuvent toujours partir. Mais là encore, cette confirmation est tardive. Comment peut-on réunir en quelques jours un effectif suffisant ? Ces enfants peuvent-ils choisir librement la colo dans laquelle ils vont aller ? Est-ce souhaitable de précipiter un départ, alors que cet événement particulier se prépare plusieurs semaines à l'avance pour être mûri ? Et quel sens prend encore une colo quand elle n'offre aucune expérience de mixités ?

Nous pouvons alors assez facilement supposer que ce choix d'ouverture partielle ne s'est pas fait, une fois de plus, dans l'intérêt des mineurs. En effet, lors des vacances de décembre, les départs en colo pour ce public cible était en grande partie un moyen de permettre aux familles d'accueil de poser leurs vacances. Si le motif parait légitime, la solution proposée par l'Etat semble loin d'être satisfaisante. Pire encore, elle apparait d'une injustice criante envers tous et toutes : les enfants confiés à l'ASE qui devront encore vivre dans leur entre-soi, les familles monoparentales pour lesquelles la colo peut être un mode de garde essentiel, les familles qui comptaient sur cette colo pour offrir un bol d'air aux enfants enfermés dans des petits appartements...

L'hiver, ce n'est pas que le ski !

Enfin, nous regrettons que la DJPEVA appuie sa décision de suspendre les colos en invoquant la "cohérence avec les décisions prises récemment, notamment celles relatives aux stations de ski". C'est méconnaître que les colos d'hiver n'axent pas toutes leurs activités sur la pratique du ski. Le fait que les remontées mécaniques soient fermées n'empêche pas les enfants de profiter des autres facettes de la montagne : faire de la luge, construire un igloo, se rendre dans une fromagerie, etc.

Dans ces territoires, c'est toute une économie qu'il convient de soutenir. Les acteurs et actrices des colos contribuent chaque année à maintenir l'emploi local et à développer les filières d'approvisionnement de proximité. Quand une exploitation agricole a comme client principal une cantine scolaire, elle apprécie d'avoir une colo pour prendre le relais durant les vacances. Quand un autocariste organise surtout des liaisons scolaires, le transport d'une colo pendant les vacances est le bienvenu.

La situation des colonies de vacances est actée pour l'hiver. Les prévisions ne sont pas encourageantes pour le printemps. Pour l'été qui vient, c'est tout un écosystème qu'il faut soutenir. Celui des colos qui contribuent à faire société, celui des territoires ruraux qui préservent l'emploi et le savoir-faire, celui du patrimoine des centres de vacances qui offrent de grands espaces dans des milieux privilégiés.



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